dimanche 29 janvier 2017

La vie rêvée de Virginia Fly - Angela Huth

Présentation de l'éditeur :


Souvent, debout face à ses élèves ou allongée sur son lit, Virginia Fly a la vision merveilleuse d’une main d’homme caressant son corps, déclenchant un frisson le long de son épine dorsale. Que ferait-elle si un inconnu apparaissait à la fenêtre, pénétrait dans la pièce et la séduisait? Car à trente et un ans, Virginia, toujours vierge, vit sagement chez ses parents, dans la banlieue de Londres. Il y a bien son ami Hans, un professeur mélomane, mais ce n’est pas lui qui assouvira ses fantasmes. Non, celui qu’elle attend, c’est Charlie, son correspondant américain, dont la visite s’annonce enfin après douze années d’échanges épistolaires. Seulement cette arrivée coïncide aussi avec la diffusion d’un reportage télévisé sur Virginia, qui se prend à rêver que, parmi les opportunités tout à coup florissantes, il en est une – peut-être le charmant Ulick Brand ? – qui saura combler ses attentes.
La Vie rêvée de Virginia Fly est un roman finement observé, à la fois tendre, un peu cruel et d’un humour malicieux. Écrit en 1972, il est étonnant de modernité.

Mon avis :

Virginia Fly n'est pas une Vénus de Panurge*, c'est juste une femme  qui, arrivée à la trentaine, n'a pas encore été séduite. On ne peut pas dire qu'elle ait souhaité rester vierge  mais elle n'a pas une vie sociale très développée, correspond depuis douze ans avec un américain de son âge dont elle ferait volontiers son mari et va de temps en temps au concert avec le professeur, un homme plus âgé qu'elle.  Nous la rencontrons au moment ou le changement arrive pour elle, son correspondant vient enfin en Angleterre et les espoirs de changement s'ouvrent pour Virginia, mais la route sera difficile. Tout au long du roman, on découvrira son caractère, sa capacité à un humour souvent  caustique envers  le milieu dans lequel elle évolue et les évènements qui la touche, une autodérision aussi et puis un grand manque de confiance en elle.
Angela Huth a ciselé ce roman en 1972, c'est son second roman publié sous le titre original "Virginia Fly is drowning" il vient tout juste d'être traduit et publié en France. Elle dépeint à merveille la solitude de Virginia avec beaucoup de tendresse, ce qui n'empêche pas un regard extrêmement caustique et souvent réjouissant sur son entourage et les gens qu'elle rencontre. Une fois embarqué dans l'histoire, ce qui se produit dès les premières pages,  il est bien difficile de s'arrêter, on a vraiment envie de connaitre l'évolution de notre héroïne et à quel moment ses déboires vont enfin s'arrêter.
Une très belle écriture pour un excellent roman.

 * Vénus de Panurge : Georges Brassens, Chansonnette à celle qui reste pucelle.

La femme au carnet rouge - Antoine Laurain

Présentation de l'éditeur :


Un matin à Paris, alors qu'il ouvre sa librairie, Laurent Letellier découvre dans la rue un sac à main abandonné.

Curieux, il en fait l'inventaire et découvre, faute de papiers d'identité, une foule d'objets personnels : photos, parfum... et un carnet rouge rempli de notes. Désireux de retrouver la propriétaire du sac, Laurent s'improvise détective. À mesure qu'il déchiffre les pages du carnet contenant les pensées intimes de l'inconnue, le jeu de piste se mue progressivement en une quête amoureuse qui va chambouler leurs vies.



Mon avis :

Un sac volé, sa propriétaire, Laure, dans le coma, un libraire, Laurent,  qui trouve le sac, essaie de l'emmener au commissariat mais n'a pas le temps d'attendre qu'on le reçoive et voilà posées les bases d'un joli conte de fée. Oui, ça ne commence pas très bien, je vous l'accorde, mais dans ce sac se trouvent un grand nombre de petites choses qui vont entrainer Laurent dans une enquête pour en retrouver la propriétaire, un coup de main lui sera donné par sa fille une lycéenne qui n'a pas froid aux yeux et tout finira très bien. Mais n'oublions pas les autres personnages principaux, d'abord le sac à main, un résumé de la vie de sa propriétaire, cliché ? Je vous l'accorde. Et puis enfin Laure qui finira par se réveiller et devra à son tour mener l'enquête.

Un rythme enlevé, une écriture pleine de clins d'œil littéraires, une histoire qui finit bien, oui, un conte moderne qui se dévore en une fin d'après midi. Vous avez deviné, j'ai beaucoup aimé. Un roman pétillant à déguster entre deux lectures plus sérieuses.


vendredi 20 janvier 2017

D'acier - Silvia Avallone

Présentation de l'éditeur :


Anna et Francesca ont treize ans, presque quatorze. C’est l’été à Piombino, ville désolée de Toscane bien loin de l’image de carte postale que l’on peut s’en faire quand on n’est pas d’ici. Chez elles, pas de vignes et Florence et son art sont bien loin. Leur quotidien : des barres d’immeubles insalubres et surtout l’aciérie, personnage monstrueux qui engloutit jour et nuit tous les hommes du coin.

Les hommes, ils ne sont pas à l’honneur dans le roman de Silvia Avallone. Le père d’Anna est un fantôme, un voyou du dimanche qui réapparait quand ça lui chante. Celui de Francesca nous est présenté dès les premières lignes, puissantes, comme un homme qui épie sa fille aux jumelles pendant qu’elle joue sur la plage, obsédé par ce corps qui se transforme, irrémédiablement, malgré les coups qu’il lui porte, ce géant sans cervelle.

Mais Anna et Francesca, les reines de la cité, éclaboussent toute cette laideur de leur jeunesse insolente. Treize ans et demi mais déjà starlettes, elles jouent de cette aura qu’elles savent par instinct éphémère, avant que la réalité des autres ne les rattrapent. En attendant, elles rêvent. D’être écrivain ou femme politique pour l’une, de passer à la télé de Berlusconi pour l’autre, ou simplement d’aller ensemble, pour la première fois à l’île d’Elbe, inaccessible et pourtant à quelques brasses de leur cité plombée.

Autour d’elles, il y a aussi le grand-frère d’Anna, Alessio, Apollon échoué au royaume d’Hadès, amoureux abandonné, déjà usé à vingt ans par des années passées au haut fourneau, à faire couler l’acier et à se défoncer pendant les pauses. Sandra, leur mère, la militante d’extrême gauche, qui assure et qui se maudit d’aimer malgré tout son vaurien de mari. Rosa, enfin, la mère de Francesca, la petite calabraise arrachée à son village par Enrico, cet homme fruste qui les enferme dans sa folie et qu’elle ne quitte pas. Pour aller où ? C’est trop tard semblent-ils tous penser. Les parents, les vieux, les grands-frères, résignés, lassés, tous. Pas Anna et Francesca, pas si elles sont deux, toujours.

"D’acier" est un roman physique, qui vous happe dès la première page, pour vous relâcher, quatre cents pages plus tard, un peu sonné, avec le sentiment d’être face à un futur grand écrivain qui, à tout juste vingt cinq ans, fait preuve d’un sens de la narration assez exceptionnel et d’une capacité à saisir l’essence de l’adolescence, ces amitiés fusionnelles qui nous construisent et cette obsession de la beauté, cette fascination régressive qu’elle peut susciter chez ceux qui n’en sont plus.

D’acier pourrait n’être qu’un portrait social sombre d’une Italie de banlieue, de laissés pour compte sans envergure, pauvres humains tentant de se dépêtrer d’un monde qu’ils n’ont pas vu venir. Il est bien plus que cela. L’acier est constitué d’au moins deux éléments. D’acier aussi : d’une réalité désespérante et d’une petite poésie qui s’élève malgré tout, et l’ensemble, ça donne un sacré bon roman.

Mon avis : 

Une cité pauvre au bord de la mer face à l'ile d'Elbe, deux adolescentes qui passent trop vite dans le monde des adultes, leurs familles pas toujours simple, leurs amis  et puis l'usine où on produit l'acier, personnage à part entière. Cela fait un roman haletant qui nous emmène  dès les premières pages, des personnages pas toujours sympathiques mais que l'auteur nous rend attachants malgré tout, c'est deux années de la vie d'Anna et Francesca et de ceux qui  les entourent qui nous est contée, c'est l'adolescence et ses troubles, c'est l'amitié, l'amour, les colères, les drames dont on est témoin dans un tourbillon qui ne nous lâche qu'à la toute dernière page.

L'écriture est dense, fluide, très agréable à lire, parfois avec un coté cinématographique, Silvia Avallone nous embarque dans son roman et il est bien difficile de s'arrêter.

Et au fond du paysage, comme un rêve permanent, l'ile d'Elbe, Anna et Francesca finiront-elles par y aller, ensemble ?