mercredi 6 février 2013

Monsieur Croche, Antidilettante - Claude Debussy

Présentation de l'éditeur :


Indépendant et incisif, parfois sarcastique, toujours provocant, Debussy a exercé le métier de critique avec une grande liberté. En exprimant des jugements sur les compositeurs de son temps et sur ceux du passé, il révèle quelles sont les œuvres qui ont nourri sa propre sensibilité. 




Mon avis :

Un très beau recueil de critiques sur la musique de son temps. Je connaissais bien sur le  compositeur Debussy, mais ce livre m'a permis de découvrir le critique, dans un style très agréable à lire, après s'être essayé à utiliser un imaginaire Monsieur Croche pour donner son avis sur musique et interprètes de son temps, il reprend les commandes en son nom et nous montre avec sévérité mais en restant toujours positif, les travers de la musique  et surtout de ses interprètes.

Quelques extraits :


Sachez donc bien qu’une véridique impression de beauté ne pourrait avoir d’autres effets que le silence… ? Enfin, voyons ! quand vous assistez à cette féerie quotidienne qu’est la mort du soleil, avez-vous jamais eu la pensée d’applaudir ? Vous m’avouerez que c’est pourtant d’un développement un peu plus imprévu.

Les musiciens n’écoutent que la musique écrite par des mains adroites ; jamais celle qui est inscrite dans la nature. Voir le jour se lever est plus utile que d’entendre la Symphonie Pastorale.

Et c’est toute la différence entre l’art de Wagner, beau et singulier, impur et séduisant, et l’art de Franck qui sert la musique sans presque lui demander de gloire. Ce qu’il emprunte à la vie, il le restitue à l’art avec une modestie qui va jusqu’à l’anonymat. Quand Wagner emprunte à la vie, il la domine, met le pied dessus et la force à crier le nom de Wagner plus haut que les trompettes de la Renommée.

Je n’ai pas l’intention de contribuer à l’histoire de la musique. Seulement je voulais insinuer qu’on a peut-être tort de jouer toujours les mêmes choses, ce qui peut faire croire à de très honnêtes gens que la musique est née d’hier, tandis qu’elle a un Passé dont il faudrait remuer les cendres : elles contiennent cette flamme inéteignable à laquelle notre Présent devra toujours une part de sa splendeur.

Enfin ! J’ai pu voir M. Grieg… De face, il a l’air d’un photographe génial ; de dos, une façon de porter les cheveux le fait ressembler à ces plantes appelées « soleil », chères aux perroquets et à ces jardins qui font l’ornement des petites gares de province.

Le public anglais écoute avec une attention, on peut dire forcenée. S’il y a ennui, cela ne se trahit jamais ; la salle étant, d’autre part, plongée dans l’obscurité pendant la durée des actes, on peut même y dormir en toute sécurité. On applaudit seulement à la fin de chaque acte, tradition essentiellement wagnérienne ; et le docteur Richter s’en va content, insensible aux ovations, peut-être impatient d’une bière réparatrice.

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